La lithographie en niveaux de gris devient essentielle dans la microfabrication, en particulier pour les industries qui exigent des microstructures 2,5D complexes. Des éléments micro-optiques tels que les lentilles réfractives et diffractives aux applications biomédicales telles que les organes sur puce, le besoin de motifs en niveaux de gris plus profonds et plus précis se fait de plus en plus sentir. Toutefois, l’obtention de structures en niveaux de gris profonds et de haute qualité constitue un défi de taille, en particulier lors de l’utilisation de résine photosensible très sensible.
La hauteur des structures en lithographie en niveaux de gris est limitée par l’épaisseur du film de résine photosensible. L’utilisation de photorésines positives à base de DNQ disponibles dans le commerce permet de fabriquer des structures d’une hauteur allant jusqu’à 80 μm. Cependant, lorsque l’on vise des profondeurs de motif plus importantes, l’azote qui se forme pendant la photolyse induit une formation prononcée de bulles à l’intérieur des structures.
L’étude sur laquelle se base cette contribution a exploré les difficultés liées à la création de motifs en niveaux de gris d’une profondeur supérieure à 100 µm à l’aide d’une nouvelle résine photosensible positive mise au point par micro resist technology, mr-P 22G_XP. Cette résine à base de diazoquinone/novolak a été spécialement conçue pour les structures très profondes ou les applications en niveaux de gris dans des films très épais. Elle résout le problème courant de la formation de bulles d’azote qui peut déformer les couches ultra-épaisses. L’étude a révélé les difficultés rencontrées lors de l’adaptation de cette réserve à la lithographie en niveaux de gris à l’aide d’un masque photographique, en donnant des indications sur le comportement de la réserve, les exigences en matière de masque et les techniques de transfert de motifs.
Photomasque ou écriture directe : Une question d’équilibre
L’écriture directe par laser et l’écriture à partir d’un masque photographique présentent toutes deux des avantages distincts. La lithographie par masque photographique permet une exposition rapide de substrats de grande taille, ce qui la rend intéressante pour les applications industrielles à grand volume. Toutefois, les masques à niveaux de gris doivent être soigneusement optimisés pour tenir compte de la sensibilité de la résine, afin d’éviter des déviations indésirables du motif. À l’inverse, l’écriture directe par laser offre un contrôle supérieur des niveaux d’exposition, en particulier lors de l’utilisation d’expositions multiples contrôlées à faible dose via le mode « N-Over » et les techniques CI-Over (Continuous Intensity Overlap), ce qui permet de corriger les réponses non linéaires des résistances et les variations d’un lot à l’autre, une prouesse difficile à réaliser avec les masques.
Le rôle du DWL 66+
Pour leurs expériences, les auteurs ont utilisé le DWL 66+ de Heidelberg Instruments, un graveur laser direct connu pour son contrôle précis de l’exposition en niveaux de gris. En utilisant plusieurs expositions qui se chevauchent (techniques N-Over et CI-Over), ils ont obtenu des motifs exceptionnellement lisses avec des profondeurs supérieures à 160 µm. Le blanchiment inhérent de la résine pendant l’exposition facilite une pénétration plus profonde de la lumière d’exposition, ce qui est essentiel pour obtenir des motifs en niveaux de gris profonds et de haute qualité. La possibilité de régler avec précision la distribution des valeurs de gris (GVD) s’est avérée particulièrement utile pour compenser les variations de la résine, un défi que les masques à niveaux de gris ne peuvent pas facilement relever.
Principaux défis de la lithographie en niveaux de gris à l’aide de masques
La résine mr-P 22G_XP, bien que conçue pour les structures profondes, présente des défis uniques dans la lithographie de masque en raison de sa grande sensibilité, en particulier à faible dose. Cette sensibilité, bien que cruciale pour atteindre des profondeurs de >100 µm, la rend sujette à la surexposition dans les zones recevant une lumière même minime, ce qui conduit à plusieurs problèmes clés :
- Sensibilité des résistances : Même une exposition minimale peut entraîner une réduction significative de l’épaisseur du film, ce qui affecte la précision du modèle. Cela signifie que les zones du masque destinées à être « sombres » peuvent encore laisser passer suffisamment de lumière pour provoquer un développement indésirable de la résine.
- Conception du masque :
- Masques pixellisés : Les masques pixellisés, où les niveaux de gris sont créés par des caractéristiques de sous-résolution, peuvent introduire une granulation visible à la surface de la résine. La haute sensibilité de la résine peut résoudre les pixels individuels du masque, créant ainsi une rugosité si la résolution est insuffisante.
- Masques en verre HEBS : Si les masques en verre HEBS (High Energy Beam Sensitive) offrent des transitions plus douces, ils présentent également des limites. Ils n’atteignent pas une transmission parfaite de 0 % ; même les zones sombres laissent passer un peu de lumière, ce qui entraîne une exposition indésirable et une perte de film dans ces régions. En outre, la conception du masque doit s’adapter à la réponse non linéaire de la résistance, une caractéristique qui n’est pas facilement disponible dans les masques HEBS actuels.
- Transfert du motif : La résine n’étant pas chimiquement ou thermiquement stable, il est essentiel de transférer les structures modelées dans des matériaux permanents.
- Optimisation de la forme et stabilité du processus : La grande sensibilité de la résine photosensible positive épaisse exige un contrôle environnemental rigoureux et une stabilité du processus. Il est essentiel de parvenir à un contrôle optimal de la forme, car même de légères déviations dans l’exposition ou l’environnement peuvent entraîner une fidélité insuffisante du modèle ou des variations dans la structure finale, ce qui compromet la qualité du processus de fabrication au sens large.
Principaux résultats
- Lithographie par masque photographique : La lithographie par masque photographique offre rapidité et efficacité, mais l’extrême sensibilité de la résistance mr-P 22G_XP rend le maintien d’une profondeur de motif précise extrêmement difficile avec la technologie actuelle des masques.
- Écriture directe au laser : L’écriture directe, en particulier avec le DWL 66+, offre un contrôle supérieur, ce qui permet d’obtenir des motifs plus profonds et plus lisses (jusqu’à 165 µm avec une rugosité de surface < 10 nm, mesurée sur le dessus et à côté du dessous d’une structure de lentille de Fresnel), mais au prix de temps d’exposition plus longs.
- Un transfert de modèle crucial : Le transfert de modèle est une étape critique. Le moulage UV avec OrmoComp® (un polymère hybride inorganique-organique adapté aux applications optiques) et la réplication PDMS (une méthode non destructive en raison de la flexibilité du PDMS) se sont avérés efficaces pour créer des structures permanentes.
L’avenir de la lithographie en niveaux de gris profonds
Si les masques à niveaux de gris sont efficaces pour la production à haut débit, l’écriture directe par laser reste la référence pour les applications exigeant une grande précision et une grande flexibilité. Avec des outils comme le DWL 66+, les chercheurs et les ingénieurs peuvent repousser les limites de la lithographie en niveaux de gris et obtenir des microstructures plus profondes et plus raffinées.
Comme ces résultats se traduisent par des processus de fabrication améliorés, ils peuvent avoir un impact direct sur les applications pratiques dans les domaines de l’optique, de la microfluidique et des dispositifs biomédicaux, favorisant ainsi une plus grande collaboration entre les industries. Le développement continu de résines optimisées, de stratégies d’exposition (y compris des expositions multiples contrôlées à faible dose) et de techniques de transfert de motifs sera essentiel pour libérer tout le potentiel de la lithographie en niveaux de gris.
Les recherches futures devraient se concentrer sur les points suivants :
- Amélioration des résines : Développement de résines à sensibilité plus faible et mieux contrôlée (tout en permettant des structures profondes) ou de résines moins sensibles à la perte d’épaisseur pendant l’exposition.
- Technologie avancée des masques : Création de masques avec une résolution nettement plus élevée pour des techniques de sous-résolution efficaces et un contraste amélioré (zones sombres) pour mieux contrôler les résines très sensibles. Il s’agit notamment d’explorer de nouveaux matériaux et de nouvelles méthodes de fabrication.
La poursuite du développement dans ces domaines sera essentielle pour réaliser pleinement le potentiel de la lithographie en niveaux de gris pour une large gamme de technologies de pointe.
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